- Dimanche 16 septembre 2012 : une date à marquer d’une pierre blanche dans le Livre d’Histoire des Arènes de Nîmes. En fin de matinée, devant des gradins combles, se déroule l’une des corridas du siècle, à guichets fermés. José Tomás défie en solitaire six toros issus des élevages de Victoriano del Río, Jandilla, El Pilar, Parladé et Garcigrande. En 2h35 de course, le torero madrilène livre l’une des plus grandes prestations de sa carrière, réalisant l’exploit d’estoquer chaque toro d’un seul coup d’épée, de façon quasi-foudroyante. Un seul toro n’est pas estoqué : le 4^e, gracié par la présidence à l’issue d’une faena sublime de José Tomás. Porteur du fer de Parladé, « Vándalo », n°31, negro mulato, 510 kg, né en décembre 2007, réintègre le toril dans une ambiance indescriptible. Toréant comme sur un nuage, José Tomás coupe les deux oreilles du Victoriano del Río d’ouverture, accueilli avec souplesse et raffinement dans une cape en soie. Deux nouveaux pavillons tombent du balcon présidentiel à l’issue d’une faena d’une intelligence technique absolue face à la caste du 2^e toro de Jandilla. Les spectateurs basculent dès lors dans l’émotion de la faena quasi-parfaite face au pupille d’El Pilar, divinement toréé à gauche, pour deux nouvelles oreilles et une communion entière. L’indulto du toro de Parladé ajoute une pierre supplémentaire à ce torrent de torería et d’expression d’une esthétique tauromachique touchant au sublime. Deux oreilles et la queue symboliques auxquelles s’ajoutent deux nouveaux appendices au 5^e toro de Garcigrande, dompté par arrucinas et naturelles pieds joints. Un dernier trophée vient ponctuer ce morceau d’art livré par José Tomás, bousculé par le tempérament du 6^e Victoriano del Río, vibrant et encasté. Onze oreilles et une queue, la corrida parfaite, Nîmes chavire, José Tomás et Simon Casas se donnent l’abrazo avant que le grand maestro n’ouvre une nouvelle fois la Porte des Consuls. Le public est commotionné par l’instant d’art majeur qu’il vient de vivre… Encore sous le choc émotionnel, les spectateurs qui remplissent les arènes de Nîmes pour la corrida de l’après-midi ne réagissent quasiment au spectacle qui se déroule en piste. Malgré leurs efforts, Julián López « El Juli » et Sébastien Castella subissent la passivité d’un auditoire qui pense encore à José Tomás… La course manque cruellement de relief malgré les belles démonstrations des deux matadors face aux toros de Daniel Ruiz. Une oreille récompense la première et la troisième faena du torero madrilène tandis que Sébastien Castella empoche trois pavillons et le droit d’ouvrir la Porte des Consuls. Mais la tête des spectateurs était incontestablement ailleurs…

- Vendredi 16 septembre 2016 : l’élevage héraultais de San Sebastián effectue une présentation réussie aux arènes de Nîmes. Avec deux novillos supérieurs, le fer de la famille Vangelisti permet à Manolo Vanegas et Tibo Garcia de briller sur la piste de l’amphithéâtre. Le novillero vénézuélien est récompensé par l’oreille de ses deux adversaires alors qu’un seul pavillon récompense la seconde faena de Garcia. Un autre trophée revient entre les mains d’Andy Younès à l’issue de sa lidia du 5^e novillo, qui le blessera légèrement.

- Samedi 16 septembre 2017 : à 11h50, Andy Younès devient le 63^e matador de toros de l’histoire de la tauromachie en France, après avoir reçu la muleta de Juan Bautista, en présence d’Alejandro Talavante, face au toro « Gavilán », n°66, castaño, 507 kg, né en octobre 2012, de l’élevage de Núñez del Cuvillo. Une belle cérémonie, couronnée d’un premier triomphe et d’une sortie en triomphe par la Porte des Consuls, trois oreilles à la clé. Le récipiendaire passe sous l’arche de la grande porte au côté de son parrain et concitoyen, lui aussi crédité de trois pavillons. Héritant du moins bon lot, Alejandro Talavante ne peut rivaliser avec les deux matadors tricolores. L’après-midi, Enrique Ponce et Sébastien Castella se mesurent pour la première fois en mano a mano aux arènes de Nîmes. Particulièrement inspiré, Enrique Ponce donne une appréciable palette de son art devant le 1^er toro de Vellosino, dépossédé d’un trophée, puis face au 3^e exemplaire de Núñez del Cuvillo, avec une double récompense et une vuelta posthume pour le toro. Trois oreilles coupées pour le maestro de Chiva qui ouvre à nouveau la Porte des Consuls alors que son filleul d’alternative essuie un échec avec l’épée. Une seule vuelta pour Sébastien Castella, auteur de sa prestation la plus convaincante devant le 4^e toro de l’après-midi, porteur du fer de Fuente Ymbro, et dédié à Enrique Ponce.

- Dimanche 16 septembre 2018 : la Feria des Vendanges se clôture par la célébration de deux corridas. En fin de matinée, Simon Casas réunit un paseo 100% tricolore totalement inédit. En piste, la rejoneadora nîmoise Léa Vicens est accompagnée des matadors de toros Juan Bautista et Sébastien Castella. Une course lumineuse, relevée par le bon jeu des toros de Capea et de Núñez del Cuvillo. L’amazone ouvre la Porte des cuadrillas après avoir ravi l’oreille de ses deux adversaires. Ses compatriotes quittent les arènes de l’autre côté de l’ovale, sous l’arche de la Porte des Consuls, à l’issue d’une partition de toreo pléthorique : pour sa dernière corrida à Nîmes, Juan Bautista coupe quatre oreilles et Sébastien Castella ne fait pas de demi-mesure en conquérant pas moins de quatre oreilles et une queue. L’ultime toro de la corrida, « Encumbrado », n°169, de robe jabonera, annoncé à 535 kg et né le 12 novembre 2013, est honoré d’une vuelta posthume. Une corrida marquante qui annonçait une course de clôture époustouflante. Devant les caméras de la télévision espagnole venue retransmettre l’événement en direct, Victorino Martín livre l’une de ses plus grandes corridas de la temporada et surtout le meilleur lot de l’année en France. « Gallego », « Herbolario », « Minotauro », « Director », « Directivo » et « Paquetillo » offrent plus de deux heures d’un spectacle intense et passionnant face aux capes et muletas avisées de trois matadors débutants à Nîmes. Une première pour Octavio Chacón, Emilio De Justo et Pepe Moral pour une triple confirmation d’alternative inédite depuis sa mise en place aux Vendanges 2006. Des lidias soignées de Chacón aux naturelles sublimées de Moral, en passant par le toreo d’empaque de Justo, les spectateurs jouissent d’un grand moment d’art tauromachique. « Paquetillo », le 6^e toro, n°72, negro entrepelado bragado meano, annoncé à 546 kg et né le 4 décembre 2013, est honoré d’une vuelta posthume après avoir infligé une blessure grave à Pepe Moral. Du courage, une part d’inconnu et une bonne dose d’héroïsme pour cette conclusion de saison sur une note dramatique. Crédité de l’oreille de ses deux victorinos, Octavio Chacón sort en triomphe par la Porte des cuadrillas alors que Pepe Moral est transféré en urgence au CHU de Nîmes, après avoir coupé l’oreille de ce 6^e toro. Avec un seul pavillon récolté devant le 5^e exemplaire de cette corrida pour l’Histoire, Emilio De Justo perd avec l’épée une probable Porte des Consuls. Une journée dominicale à marquer d’une pierre blanche pour l’un des grands moments de la temporada 2018.

Abrazo entre Simon Casas et José Tomás lors de la corrida historique du 16 septembre 2012 aux arènes de Nîmes (crédit photo : Anthony Maurin).