En l’espace de quelques temporadas, Léa Vicens est devenue l’une des meilleures interprètes de l’art du toreo à cheval. Une dernière décennie marquée par sa prise d’alternative à Nîmes, en 2013, six ans avant sa première sortie en triomphe par la Grande porte de la Monumental de Las Ventas. Une première pour une rejoneadora dans la capitale espagnole. Un succès qui est l’illustration d’une grande saison dans les arènes européennes pour l’amazone nîmoise, qui a obtenu un total de 14 oreilles en arènes de première catégorie sur 10 courses toréées.
Sous la plume de Juan Manuel Sánchez-Morate, Léa Vicens revient sur les temps forts de cette saison pleine qui l’a vue terminer première de l’Escalafón de sa discipline pour la troisième année consécutive, avec le sommet de Las Ventas : « Madrid, c’est Madrid. Dès que je me suis vue annoncée au cartel, j’ai ressenti une sensation très spéciale. D’une part, c’est un privilège de toréer dans les arènes les plus importantes au monde. D’autre part, c’est avoir l’opportunité de démontrer le travail réalisé pendant des mois, si ce n’est pendant des années. Si à cela nous ajoutons la satisfaction de partager l’affiche avec une grande vedette comme l’est Pablo Hermoso de Mendoza, réaliser deux faenas importantes et ouvrir la Grande porte, eh bien, c’est un rêve devenu réalité », avant de préciser « lors de cet après-midi, les toros ont collaboré dans une bonne mesure, les chevaux ont été à un bon niveau et les faenas ont été émouvantes, équilibrées et mesurées. La connexion avec les aficionados s’est établie du début jusqu’à la fin. Je peux dire que tout s’est déroulé à la perfection, même s’il n’est pas facile de réunir tous ces ingrédients ».
Un triomphe que Léa Vicens a souhaité dédier à plusieurs personnes qui ont compté dès le début de sa carrière : « c’est un moment que j’ai voulu partager avec ma famille, avec une pensée pour Ángel Peralta, avec mon apoderado Simon Casas et toute mon équipe. Je n’oublie évidemment pas toutes mes consœurs qui, depuis des années, travaillent durent pour se faire une place dans cette discipline artistique magique, mais ô combien dure, qu’est le toreo à cheval ». Une analyse qui prend également en compte les grands triomphes obtenus à Burgos, Salamanque, Logroño, Valencia ou encore Jaén, sans oublier la France : « c’est mon pays, je ressens une grande responsabilité chaque fois que j’y torée. Je prends beaucoup de plaisir mais une certaine pression m’envahit car je ne veux pas tromper les aficionados qui viennent me voir. En France, on m’a vue évoluer jusqu’à la place que j’occupe dans l’actualité. Je sens qu’on m’y respecte beaucoup et que les gens sont fiers de moi, que d’une certaine manière ils me considèrent comme un exemple à suivre. Ces facteurs m’obligent donc à tout donner : mes triomphes les plus importants ont eu lieu à Dax, Béziers et Nîmes, qui sont les arènes les plus importantes en France ».
Une recette du succès que Léa Vicens explique notamment par la rigueur de son travail et de son entraînement concernant l’équitation : « le dressage classique est la base de l’équitation classique. C’est une modalité qui permet de développer les capacités physiques, mais aussi psychologiques, tout en respectant la personnalité et la créativité du cheval, avec l’objectif que celui-ci puisse s’épanouir de la manière la plus libre possible, avec légèreté, versatilité et élégance. J’essaie d’appliquer ce type de dressage avec les poulains car les effets sont très positifs (…) En ce sens, le dressage essentiel concernant le dressage d’un cheval torero demeure la doma vaquera qui, au campo, permet au cheval d’intégrer les notions de soumissions, d’efficacité et de sûreté pour ensuite aller défier le toro brave dans une arène ». Même si le cheval occupe une large place dans la vie de Léa Vicens, celle-ci a d’autres activités « dans le peu de temps libre qui me reste. Pendant l’hiver, je monte quotidiennement à cheval pendant deux heures et lorsque j’ai terminé, je suis crevée ! Pour autant, pendant que je me repose, j’aime lire, regarder un film ou encore écouter de la musique » confie la rejoneadora française, également amatrice de gastronomie : « la cuisine française me passionne, mais aussi celle d’Espagne. J’avoue aimer bien manger et j’en profite. En revanche, aller faire les boutiques, très peu pour moi. Si un jour je vais en ville pour acheter des affaires, cet achat me fait l’année ! Je suis la mode et je suis attentive de ses tendances, mais vraiment je ne suis pas attirée par le lèche-vitrines ».
Durant ce mois de février, Léa Vicens participera à trois festivals taurins, dans l’attente de la préparation de la prochaine temporada : « compte tenu des triomphes que j’ai obtenus l’année dernière dans les arènes les plus importantes, j’espère que les impresarii vont tenir compte de ce paramètre et me répéter en 2020 ». Une année qui sera portée par les chevaux vedettes de l’amazone nîmoise, « Bético », « Gazela » et « Bach », « trois chevaux fondamentaux dans mon écurie, qui traversent un excellent moment et qui sont la clé de mes triomphes. Je leur en suis très reconnaissante, surtout parce que leur attitude et leur comportement m’ont énormément enrichie en termes de lidia du toro. Ces chevaux sont capables de résoudre n’importe quel problème qui surgit en piste, même si chacun a sa propre personnalité et son concept de toreo » précise Léa Vicens, qui complète son analyse en faisant référence à six autres montures qui pourraient être considérées comme les héritières des trois précédemment citées : « Diluvio » (faena), « Sorpresa » (réception), « Faraón » (réception), « Nono » (faena), « Dorado » (faena) et « Rey » (estocade).
Vuelta de Léa Vicens lors de son triomphe madrilène du 8 juin 2019 (crédit photo : Plaza 1).