DOMINGO HERNÁNDEZ : LA DISPARITION D’UN GRAND ÉLEVEUR


Nous n’avions pas encore eu le temps de l’évoquer, mais le monde du toro bravo vient de perdre l’un de ses principaux ambassadeurs en la personne de Domingo Hernández. C’est en effet le vendredi 2 février dernier qu’est décédé le célèbre éleveur à l’âge de 76 ans dans une clinique madrilène, des suites d’une complication pulmonaire. Natif de Humanes (Madrid), Domingo Hernández était le propriétaire de deux élevages connus du monde de l’afición : Garcigrande et Domingo Hernández.

Deux fers et deux devises présents depuis plus d’un quart de siècle sur les affiches des principales ferias européennes au premier desquelles figure Nîmes. Pourtant, rien ne prédestinait Domingo Hernández au métier d’éleveur, lui qui n’avait jamais eu d’antécédents ganaderos au sein de sa famille. Une vocation contractée suite à son mariage avec Concha Escolar, issue d’une grande dynastie d’éleveurs de toros braves, dont on connaît notamment aujourd’hui le nom de José Escolar Gil.

De 1984 à 1987, Domingo Hernández fit l’acquisition de différents fers et lots de bêtes afin de former son propre troupeau, tout d’abord avec du bétail de Maribáñez et Amélia Pérez Tabernero, puis avec du cheptel du grand maestro des années 30, Domingo Ortega. Sur cette base, il entama un long travail de sélection et commença à orienter son sang vers du Juan Pedro Domecq au début des années 90. L’achat de nouvelles vaches et étalons lui permit de refonder entièrement son élevage jusqu’à former un immense empire ganadero, avec un nombre impressionnant de sementales porteurs de sa propre marque.

Une dynamique qui lui a permis, dès le milieu des années 90 – avec une première corrida à Nîmes le 3 juin 1995 pour un mano a mano entre José María Manzanares et Julio Aparicio II –, de proposer chaque saison un grand nombre de lots de toros. Depuis le début du XXIe siècle, Domingo Hernández est par ailleurs devenu l’un des élevages de prédilection de vedettes de la tauromachie comme José Tomás, El Juli ou encore José María Manzanares II. Des figuras qui apprécient la mobilité de ces toros mais aussi et surtout la régularité du jeu proposé par les pupilles de l’élevage établi dans la province de Salamanque.

Un fer qui avait été élu l’an passé meilleur élevage de la Feria de San Isidro à Madrid, au côté du meilleur toro du cycle récompensant la ganadería de Jandilla pour son toro « Hebreo ». Un élevage aujourd’hui dirigé par le fils aîné de Domingo Hernández, Justo, qui préside aux destinées de la gestion de la finca de Garcigrande. Depuis 23 ans, les arènes de Nîmes ont inscrit en lettres d’or bon nombre de toros importants porteurs de la devise bleue, rouge et verte de Domingo Hernández ou encore des rubans blanc et rouge de Garcigrande.

Lors de la dernière Feria de Pentecôte, El Juli et López Simón signèrent sous le déluge deux faenas notables face à ces toros. Un élevage de Garcigrande également associé à la Porte des Consuls d’El Juli, lors de la Pentecôte 2014, en marge de l’alternative du torero valencian Román. Deux ganaderías présentes lors des adieux inoubliables de Denis Loré, le dimanche 16 septembre 2007, avec un toro de révolution, « Mesonero », n°100, castaño, annoncé à 564 kilos et né en septembre 2003, gratifié d’un tour de piste posthume, qui aurait mérité d’être gracié du fait de son niveau de bravoure et de transmission, et auquel Joselito Adame avait ravi deux oreilles incontestables.

Une corrida historique à l’issue de laquelle le jeune torero mexicain avait ouvert la Porte des Consuls aux côtés de Denis Loré et José Tomás. Un indulto qui allait survenir un an et demi plus tard, lors de l’édition 2009 de la Feria de Pentecôte, avec la grâce du 4e toro de la corrida de Garcigrande, « Llanero », n°83, de robe noire, annoncé à 488 kilos, né en novembre 2004, entre les mains d’un Javier Conde transfiguré. Autant de toros, d’histoires et de souvenirs pour un éleveur dont les ganaderías ont donné une nouvelle dimension au « Domecq de Salamanque ».

(Crédit photo : Mundotoro).